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Camille Mortenol – Premier Guadeloupéen à Polytechnique et héros de la défense de Paris

Fils d’anciens esclaves, brillant officier de marine, stratège militaire durant la Première Guerre mondiale, puis militant anticolonial : Camille Mortenol est une figure majeure de l’histoire française et antillaise. Retour sur le destin hors du commun d’un homme effacé par l’histoire française pendant un temps.

Origines et éducation d’un génie antillais

Né le 29 novembre 1859 à Pointe-à-Pitre (Guadeloupe), Camille Mortenol est le fils d’André Mortenol, ancien esclave affranchi, et de Julienne Toussaint, couturière. À une époque où les Noirs sont largement exclus des élites, il intègre le prestigieux lycée Montaigne à Bordeaux grâce à une bourse, où il se distingue par son intelligence exceptionnelle.

En 1880, il devient le premier Guadeloupéen admis à l’École Polytechnique depuis l'exclusion des Noirs décidée par Napoléon Bonaparte en 1802. Un fait rarissime à l’époque pour un homme de couleur.

⚓ Une brillante carrière navale freinée par le racisme

À sa sortie de Polytechnique en 1882 (classé 18e sur 205), Mortenol choisit la Marine nationale. Il gravit les échelons : enseigne de vaisseau, lieutenant, puis capitaine de frégate et enfin capitaine de vaisseau en 1912. Il participe aux campagnes coloniales françaises à Madagascar, au Gabon et au Congo.

Officier exemplaire, décoré à plusieurs reprises pour ses hauts faits d’armes, Mortenol voit pourtant sa carrière freinée par des préjugés racistes persistants. Plusieurs rapports soulignent que son « physique » pose « problème dans le commandement », en dépit de ses compétences remarquables.

🛡️ La Première Guerre mondiale et la défense de Paris

En 1915, en pleine Première Guerre mondiale, il est nommé à la tête de la Défense Contre Aéronefs (DCA) du Camp Retranché de Paris par le général Gallieni. Bien que déçu de ne pas avoir obtenu un commandement en mer, Camille Mortenol s’illustre brillamment dans la lutte anti-aérienne contre les raids allemands, notamment les Zeppelins.

💡 Sous son commandement :

  • Installation de projecteurs pour aveugler les avions ennemis,

  • Amélioration du renseignement télégraphique,

  • Coordination avec les unités aériennes de chasse.

Grâce à ces innovations, Paris est largement protégée : sur 485 avions allemands, seuls 35 réussiront à bombarder la capitale.

En reconnaissance de son génie stratégique, Mortenol est élevé au grade de colonel de réserve dans l’artillerie en 1917. Il reçoit la Légion d’honneur en 1920 pour son « rare dévouement et compétence éclairée ».

✊🏿 Un tournant militant : de la Marine à l’anticolonialisme

Après sa retraite en 1919, Camille Mortenol rejoint les rangs de la lutte anticolonialiste. Il s’engage aux côtés de Lamine Senghor, militant sénégalais et fondateur de la Ligue de défense de la race nègre, une des premières organisations à dénoncer les violences du colonialisme français.

Devenu une figure morale et politique du mouvement anticolonial noir, Mortenol consacre ses dernières années à soutenir la cause des peuples colonisés.

⚰️ Une disparition discrète mais un héritage durable

Camille Mortenol meurt à Paris le 22 décembre 1930 à l’âge de 71 ans. Longtemps oublié dans l’histoire officielle, son œuvre et son parcours sont aujourd’hui redécouverts, notamment grâce aux recherches en histoire coloniale et aux mouvements afrodescendants.

🏛️ Hommages

  • Une rue à Paris (10ᵉ arrondissement) porte son nom depuis 1984.

  • Une statue lui rend hommage à Pointe-à-Pitre.

  • La Poste lui a dédié un timbre commémoratif en 2018.

  • Des écoles, des rues et des ouvrages célèbrent désormais sa mémoire.

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