đš Voici les 5 actualitĂ©s des Antilles-Guyane qu'il fallait retenir âł
Dimanche 15 Juin 2025
đ§Ș Scandale du chlordĂ©cone : le SĂ©nat reconnaĂźt (partiellement) la responsabilitĂ© de lâĂtat
Le jeudi 13 juin 2025, le SĂ©nat français a adoptĂ© une proposition de loi historique reconnaissant une part de responsabilitĂ© de lâĂtat dans lâutilisation massive du chlordĂ©cone, un pesticide toxique ayant durablement contaminĂ© les sols de Martinique et de Guadeloupe. Bien qu'attendue depuis des annĂ©es, cette reconnaissance reste limitĂ©e selon plusieurs Ă©lus, associations et collectifs de victimes.
âïž Ce que la loi prĂ©voit :
Reconnaissance des préjudices sanitaires, environnementaux et économiques subis par les populations et les territoires.
Mise en place dâactions de dĂ©pollution, notamment la dĂ©tection et le traitement des terres agricoles contaminĂ©es.
Renforcement du suivi médical, incluant un dépistage systématique du cancer de la prostate pour les hommes dÚs 45 ans dans les deux ßles.
CrĂ©ation dâune commission scientifique indĂ©pendante chargĂ©e de mieux documenter les impacts du chlordĂ©cone sur la santĂ©.
â ïž Les limites du texte
MalgrĂ© cette avancĂ©e symbolique, plusieurs points ont Ă©tĂ© dĂ©noncĂ©s par les Ă©lus dâoutre-mer :
Aucune crĂ©ation dâun fonds dâindemnisation spĂ©cifique pour les victimes.
Le prĂ©judice moral dâanxiĂ©tĂ© nâest pas gĂ©nĂ©ralisĂ©, alors quâil concerne potentiellement des dizaines de milliers de personnes.
Aucune mise en cause des industriels ou responsables politiques, bien que lâĂtat ait autorisĂ© lâutilisation du produit bien aprĂšs son interdiction aux Ătats-Unis.
Ces limites alimentent un sentiment dâinjustice, notamment chez les agriculteurs, les pĂȘcheurs et les femmes enceintes fortement exposĂ©es au pesticide.
đ Une contamination de masse
Les chiffres rĂ©vĂšlent lâampleur du scandale :
Environ 92 % des adultes en Martinique et en Guadeloupe ont des traces de chlordécone dans leur sang (Santé publique France).
La Martinique affiche le taux de cancer de la prostate le plus élevé au monde : 227 cas pour 100 000 habitants, contre 90 à 100 en moyenne en métropole (INSERM, INCa).
De nombreuses femmes enceintes sont également contaminées, exposant les nouveau-nés à un risque sanitaire accru.
đŁ PĂȘcheurs et agriculteurs parmi les plus touchĂ©s
Les zones cĂŽtiĂšres et les riviĂšres contaminĂ©es ont forcĂ© de nombreux pĂȘcheurs Ă abandonner leur activitĂ©, sans vĂ©ritable compensation. Les agriculteurs, eux, sont contraints de cultiver sur des terres bĂ©tonnĂ©es ou hors-sol, avec des coĂ»ts Ă©levĂ©s et une perte dâautonomie alimentaire.
La contamination du sol sur plusieurs siÚcles rend les terres difficilement exploitables et pose un enjeu majeur de développement durable.
đ§ Le difficile combat pour le prĂ©judice moral
Quelques rares personnes â comme deux ouvriĂšres agricoles guadeloupĂ©ennes en 2025 â ont obtenu rĂ©paration pour prĂ©judice moral dâanxiĂ©tĂ©, Ă hauteur de 10 000 euros environ. Mais ces cas sont isolĂ©s et exigent des dĂ©marches juridiques complexes, souvent hors de portĂ©e des personnes les plus modestes.
Les associations rĂ©clament une reconnaissance automatique, sur le modĂšle de lâamiante ou du Mediator.
Haïti : un nombre record de déplacés internes face à la violence des gangs
đș 1,3 million de personnes dĂ©placĂ©es : câest le chiffre alarmant publiĂ© ce mercredi par lâOrganisation Internationale pour les Migrations (OIM). Il marque un record historique en HaĂŻti, consĂ©quence directe de lâescalade de la violence liĂ©e aux gangs.
đ Depuis dĂ©cembre 2024, le nombre de dĂ©placĂ©s internes a augmentĂ© de 24 %, soit la plus forte hausse jamais enregistrĂ©e en si peu de temps dans le pays.
đPort-au-Prince, la capitale, demeure le principal foyer de violence, mais lâinstabilitĂ© gagne aussi des rĂ©gions pĂ©riphĂ©riques, forçant des milliers de familles Ă fuir vers des zones jugĂ©es plus sĂ»res.
đïž La majoritĂ© des dĂ©placĂ©s vivent dans des conditions extrĂȘmement prĂ©caires : abris de fortune, Ă©coles transformĂ©es en camps temporaires, manque dâaccĂšs Ă lâeau, Ă lâalimentation et aux soins de santĂ© de base.
đ LâOIM souligne que cette crise humanitaire est aggravĂ©e par lâeffondrement des services publics, l'absence de sĂ©curitĂ©, et une Ă©conomie Ă bout de souffle.
đą Les agences humanitaires appellent la communautĂ© internationale Ă renforcer lâaide dâurgence et Ă trouver des solutions durables pour restaurer la sĂ©curitĂ© et soutenir les populations dĂ©placĂ©es.
Le Guyana, seul pays au monde 100 % autosuffisant en alimentation đŸđ„
Selon une Ă©tude rĂ©cente publiĂ©e dans la revue scientifique Nature Food, le Guyana est dĂ©sormais le seul pays au monde parmi 186 analysĂ©s Ă ĂȘtre totalement autosuffisant sur le plan alimentaire. Cela signifie que le pays produit localement tous les nutriments nĂ©cessaires Ă sa population sans dĂ©pendre dâimportations alimentaires.
đ Un cas unique dâautonomie alimentaire
LâĂ©tude prend en compte des critĂšres prĂ©cis : calories, protĂ©ines, lipides, diversitĂ© des cultures, mais aussi rĂ©silience des systĂšmes agricoles. Le Guyana dĂ©passe le seuil de 100 % dans toutes les catĂ©gories, ce qui le distingue mĂȘme des grandes puissances agricoles comme les Ătats-Unis, la Chine ou le BrĂ©sil, qui restent dĂ©pendants dâĂ©changes internationaux pour certains produits de base.
Cette performance est dâautant plus remarquable que le Guyana a une population relativement faible (environ 800 000 habitants), ce qui facilite une gestion territoriale et agricole plus ciblĂ©e.
đ± Un succĂšs soutenu par la CARICOM
Ce rĂ©sultat sâinscrit dans le cadre de lâinitiative rĂ©gionale âVision 25 dâici 2025â, lancĂ©e par la CARICOM, visant Ă rĂ©duire de 25 % la facture dâimportations alimentaires de la rĂ©gion dâici 2025. Le Guyana joue un rĂŽle de premier plan dans cette stratĂ©gie en servant de modĂšle de souverainetĂ© alimentaire.
Avec son surnom de âgrenier Ă blĂ© des CaraĂŻbesâ, le pays fournit dĂ©jĂ du riz, du sucre, des lĂ©gumes, du poisson et des lĂ©gumineuses Ă plusieurs Ătats insulaires de la rĂ©gion. Il investit Ă©galement dans lâagriculture de prĂ©cision, les semences climato-rĂ©silientes et les infrastructures de transformation agroalimentaire.
â ïž DĂ©fis Ă surveiller
MalgrĂ© ses atouts, le Guyana nâest pas exempt de dĂ©fis :
Les inondations fréquentes, exacerbées par le changement climatique, menacent certaines zones agricoles.
La transition vers une agriculture durable (notamment sans pesticides) reste un objectif Ă atteindre.
Lâessor Ă©conomique liĂ© au pĂ©trole pourrait dĂ©tourner lâattention des prioritĂ©s agricoles.
đą Une opportunitĂ© rĂ©gionale
Alors que la CaraĂŻbe dĂ©pend Ă prĂšs de 60 % des importations alimentaires, le modĂšle guyanais montre quâun changement de paradigme est possible, en misant sur :
La sécurité alimentaire comme pilier de souveraineté ;
Le soutien aux petits agriculteurs locaux ;
Et une intĂ©gration Ă©conomique caribĂ©enne plus forte autour de lâagriculture.
đïž Assises populaires contre la vie chĂšre en Martinique : un forum citoyen engagĂ©
đ Les 13 et 14 juin 2025, lâEspace Laguerre, situĂ© Ă Petit-Bourg et RiviĂšreâSalĂ©e, accueille les Assises populaires contre la vie chĂšre. Cet Ă©vĂ©nement gratuit, co-organisĂ© par les dĂ©putĂ©s Marcellin Nadeau et JeanâPhilippe Nilor, fait suite Ă prĂšs de neuf mois de mobilisation initiĂ©e par le RPPRAC et Ă huit mois aprĂšs un protocole dâobjectifs signĂ© en rĂ©ponse Ă la vie chĂšre. Il intervient alors que le ministre des Outreâmer, Manuel Valls, prĂ©pare un projet de loi sur le pouvoir dâachat đ.
đŻ Objectifs de lâĂ©vĂ©nement
Favoriser un dialogue participatif entre citoyens, Ă©lus, syndicats, associations, universitaires, Ă©conomistesâŻââŻdont la prĂ©sidente du groupe LFIâNFP, Mathilde Panot, et dâautres parlementaires ultramarins.
Aborder les multiples facettes de la vie chÚre : alimentation, logement, énergie, transports et services.
Proposer des solutions concrÚtes, alimentées par les expériences locales et nationales, et éclairées par des spécialistes de la grande distribution (ex. Christophe Girardier)
đŁïž DĂ©clarations
Le dĂ©putĂ© JeanâPhilippe Nilor a soulignĂ© la volontĂ© de faire Ă©merger des rĂ©ponses gouvernementales efficaces :
«âŻDonner la parole au gouvernement, analyser leurs propositions avec lâaide dâexpertsâŻÂ»
Il a également insisté sur la complexité du phénomÚne :
«âŻLa vie chĂšre, ce nâest pas que lâalimentation⊠logement, Ă©nergie, transports aussiâŻÂ»
Pour Marcellin Nadeau, le protocole signĂ© il y a huit mois constitue « un premier pas », mais il reste incomplet, notamment en raison dâeffets de compensation entre secteurs et dâune rĂ©partition inĂ©gale des bĂ©nĂ©fices
đ Enjeux et perspectives
Mobilisation citoyenne et territorialeâŻ: participation attendue dâĂ©lus et de reprĂ©sentants ultramarins de Guadeloupe, Guyane, RĂ©union, NouvelleâCalĂ©donieâŻ; un signal dâunitĂ© face Ă lâenjeu du pouvoir dâachat
Renforcement du dialogue nationalâŻ: Ă©vĂ©nement conçu pour complĂ©ter le projet de loi du gouvernement, avec une large implication du RPPRAC.
StratĂ©gie de long termeâŻ: les assises visent Ă formuler des propositions durables, dĂ©passant la mobilisation ponctuelle, en impliquant directement les bĂ©nĂ©ficiaires du dispositif et de la sociĂ©tĂ© civile.
đ Guyane : les BrĂ©siliens dâAmapĂĄ peuvent dĂ©sormais entrer sans visa
Depuis le 5 juin 2025, les ressortissants de lâEtat brĂ©silien dâAmapĂĄ peuvent dĂ©sormais entrer en Guyane française sans visa pour de courts sĂ©jours. Cette mesure, annoncĂ©e Ă lâoccasion de la visite du prĂ©sident Lula Ă Paris et soutenue par Emmanuel Macron, vise Ă renforcer la coopĂ©ration transfrontaliĂšre entre les deux rĂ©gions.
đ Ce que prĂ©voit lâaccord
Suppression de lâobligation de visa de court sĂ©jour pour les BrĂ©siliens dâAmapĂĄ, dans le cadre dâun accord rĂ©ciproque : jusquâici, les Guyanais pouvaient se rendre au BrĂ©sil sans visa, et la mesure rĂ©tablit une symĂ©trie.
ConditionnĂ© Ă un accord de transfert pĂ©nitentiaire : lâexemption sera appliquĂ©e aprĂšs signature finale, y compris dâun protocole pour rapatrier les dĂ©tenus brĂ©siliens condamnĂ©s en Guyane.
đ€ Une avancĂ©e pour la coopĂ©ration rĂ©gionale
Cette levĂ©e de visa rĂ©pond Ă une demande de longue date des habitants dâAmapĂĄ et de Guyane, dĂ©sireux de faciliter :
les échanges économiques et culturels,
la cooperation dans la santĂ© et lâĂ©ducation,
les activitĂ©s transfrontaliĂšres, notamment via le pont de lâOyapock et les Ă©changes humains frĂ©quents.
â ïž Enjeux Ă anticiper
La mise en place du transfert pĂ©nitentiaire pourrait retarder lâentrĂ©e en vigueur dĂ©finitive de lâaccord.
Il faudra veiller à un renforcement des dispositifs de suivi en santé, sécurité et infrastructures, pour que cette ouverture soit durable et équilibrée.
đ En perspective
Avec cette dĂ©cision, la Guyane et lâAmapĂĄ posent un pas concret vers une intĂ©gration rĂ©gionale renforcĂ©e, favorisant une gestion commune des dĂ©fis frontaliers (comme la pĂȘche illĂ©gale, la santĂ© transfrontaliĂšre et la circulation des personnes). Cela rĂ©pond Ă une vision plus large de cooperation AmazonieâCaraĂŻbes, portĂ©e par les institutions rĂ©gionales.