Du 24 au 28 mai 1967, la Guadeloupe a été le théâtre d'une répression sanglante orchestrée par l'État français contre des ouvriers en grève et des manifestants, marquant profondément l'histoire de l'île.
📅 Chronologie des événements
24 mai : Les ouvriers du bâtiment entament une grève pour réclamer une augmentation salariale de 2 % et l'égalité des droits sociaux avec la métropole.
25 mai : La grève s'étend, paralysant l'activité économique.
26 mai : Des milliers de manifestants se rassemblent près de la chambre de commerce de Pointe-à-Pitre. Les négociations échouent, et des affrontements éclatent. Le préfet Pierre Bolotte ordonne aux forces de l'ordre d'ouvrir le feu sur la foule, entraînant une répression violente.
27 mai : Des étudiants et lycéens manifestent pour dénoncer les violences. La répression se poursuit, faisant de nouvelles victimes.
28 mai : Le calme revient progressivement
⚖️ Bilan humain et répression
Le bilan officiel faisait état à l’époque de 8 morts, mais des estimations évoquent entre 87 et 200 victimes, en raison de la destruction d'archives et du silence imposé aux familles.
Parmi les victimes figure Jacques Nestor, militant du GONG (Groupe d'organisation nationale de la Guadeloupe), abattu sur ordre du commissaire Canalès.
Environ 70 personnes sont arrêtées et jugées, avec des peines allant jusqu'à 30 mois de prison ferme. Le GONG est particulièrement visé par la répression.
🕊️ Reconnaissance tardive de l'État
Pendant des décennies, les autorités françaises ont gardé le silence sur ces événements. Ce n'est qu'en 2016 qu'une commission indépendante, présidée par l'historien Benjamin Stora, est mise en place pour faire la lumière sur le massacre. Le rapport qualifie les événements de "massacre" et souligne la responsabilité de l'État
Malgré cela, aucune reconnaissance officielle n'a été formulée par le gouvernement français, et de nombreuses archives restent inaccessibles.
🧠 Mémoire collective et héritage
Le massacre de mai 1967 reste un traumatisme profond pour la population guadeloupéenne. Il a contribué à l'émergence de mouvements syndicalistes et indépendantistes, tels que l'Union des travailleurs agricoles (1970), l'Union générale des travailleurs de Guadeloupe (UGTG) et l'Union populaire pour la libération de la Guadeloupe (1978).
Sources:
Guadeloupe, mai 67 – Massacrer et laisser mourir par d'Elsa Dorlin et Mathieu Rigouste
L’histoire des antilles françaises par Jhalyssa Sekhmet
Autopsie politique du massacre de mai 1967 – La Guadeloupe entre violence, terreur et résistance par Julien Mérion