Héros de l’ombre : ces Antillais et Guyanais qui ont combattu pour la France
Les Antilles et la Guyane dans les deux guerres mondiales : une mémoire longtemps ignorée
La Première Guerre mondiale : un engagement massif et oublié
En 1889, le service militaire devient un droit accordé aux masses noires. Mais ce n’est qu’en 1913, à la veille de la Première Guerre mondiale, que la conscription devient effective dans les vieilles colonies comme la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane.
Quand la guerre éclate en 1914, les gouverneurs coloniaux lancent la mobilisation générale. Des milliers d’Antillais répondent à l’appel, intégrant les régiments d’infanterie coloniale. Environ 31 000 soldats antillo-guyanais participent au conflit. Ils combattent dans la Somme, à Verdun, en Alsace, et jusqu’aux Dardanelles. Beaucoup périssent non seulement sous les balles ennemies, mais aussi à cause du froid glacial de l’hiver européen.
Parmi ces soldats, certains se distinguent. Le Guadeloupéen Louis Douidats s’illustre dans les sous-marins, le Martiniquais Pierre Rejon dans l’aviation, et des figures comme Lanzerac et Mortenol brillent par leur rôle de commandement.
Le patriotisme des Antilles ne s’exprime pas seulement sur les champs de bataille : des collectes, des dons financiers et des déclarations d’attachement à la patrie témoignent d’une solidarité forte. Pourtant, cette fidélité n’est pas immédiatement récompensée. De nombreuses pensions de guerre ne sont versées que dix ans après l’armistice.
Malgré tout, la victoire de 1918 est célébrée dans les îles. Des monuments aux morts sont érigés, comme celui de Basse-Terre en Guadeloupe, pour honorer les "morts pour la France".
🕊️ La Deuxième Guerre mondiale : la dissidence oubliée
Entre 1940 et 1943, la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane sont placées sous l’autorité du régime de Vichy. Mais dans ces territoires, une résistance s’organise : on l’appelle la dissidence. Comme en métropole, de nombreux jeunes refusent la soumission à l’occupant et au régime pétainiste.
Environ 2 500 hommes et femmes des Antilles et de la Guyane quittent clandestinement leur territoire pour rejoindre les Forces françaises libres du général de Gaulle. Certains traversent l’océan à bord d’embarcations de fortune, bravant les dangers de l’Atlantique pour rejoindre les combats en Afrique, en Europe ou au sein de la marine.
Ces héros d’outre-mer combattent pendant 350 jours sans relâche, dans l’anonymat. Leur engagement est vital, mais leur reconnaissance tarde à venir. Pendant des décennies, l’histoire officielle les a largement ignorés.
Il faut attendre bien après le 60e anniversaire de la Libération pour que leur rôle commence enfin à être officiellement salué. De nombreuses familles attendent encore aujourd’hui que leur engagement soit pleinement reconnu dans les manuels, les cérémonies et la mémoire nationale.